mardi 16 octobre 2012

Lionel Groulx, un nationaliste canadien français

Un excellent article tiré de la revue nationaliste française Militant (http://www.journal-militant.fr/) sur le grand prêtre et historien québécois Lionel Groulx qui a joué un rôle particulièrement important dans le développement de la pensée nationaliste au Québec.

Lionel Groulx, un nationaliste canadien français


Oublié des jeunes générations, Lionel Groulx, prêtre, historien, théoricien politique, fut l'âme brûlante du Canada français et compte parmi les maîtres de la pensée nationaliste. Il importe de le découvrir.

Les débuts
Il naquit à Chenaux le 13 janvier 1878 dans une famille de paysans. Après sa formation au séminaire, il fut ordonné prêtre le 28 juin 1903 et enseigna les Lettres et la Rhétorique à partir de 1900 au Collège de Salaberry-de-Valleyfield où il fonde avec l'abbé Émile Chartier, dès les premières années du siècle, un mouvement de jeunesse. Groulx relatera cette "croisade d'adolescents" dans un ouvrage, son premier, paru en 1912. Entretemps, il était allé de 1906 à 1909 étudier à Rome où il obtint les titres de docteur en théologie et en philosophie. En 1915, il devient professeur à l’Université de Montréal où il fut titulaire de la première chaire d'histoire du Canada et bâtisseur des fondations du futur département d'histoire de l'université de Montréal dans les années 1930 et 1940. Dès les années 1910, il édite une revue mensuelle appelée l’Action française. À la Ligue d'Action française, Groulx rejoignait un groupe de nationalistes tels Esdras Minville et l'abbé Archambault qui avaient milité d'abord dans la Ligue des Droits du français en faveur du bilinguisme au Québec — ce qui signifiait la restauration du français, langue de la majorité, dans l'espace public. Ils travaillaient non seulement à rétablir le sens de la fierté comme antidote au mépris colonial, à la subordination et à l'assimilation, mais à l'essor d'un nationalisme économique. Le Père Archambault quant à lui développait la doctrine sociale de l'Église à L'École sociale populaire, dont les directives influencèrent l'Action libérale nationale dans les années 1930, parti réformiste et patriote qui fut absorbé par l'Union nationale.

Un théoricien du Québec libre
Nourri de la pensée de Maurice Barrès, Groulx a tracé un programme de développement national du Québec sur les plans économique, social, culturel et intellectuel. Selon lui, cela passait d'abord par l'éducation nationale et la réforme à Québec : l'instauration d'un véritable "État français", selon son expression, impliquait de ne plus négliger cet instrument de taille qu'était l'État provincial, à la disposition des Canadiens français pour se tirer du sous-développement. Son discours n'était jamais totalement fermé à l'optique de la réforme de la Confédération. Mais il faut dire qu'il tendait alors le plus souvent à entendre "Confédération" au sens strict, union d'Etats souverains, plutôt que fédéraliste. Il tenait à souligner l'accession du Canada à l'indépendance après le statut de Westminster. De plus, son sentiment nationaliste était modéré par le christianisme catholique et il vint à comprendre les bienfaits de l'universalisme chrétien.
Groulx développa aussi un programme d’études d’histoire du Québec dans lequel il réfutait la théorie de la Conquête providentielle ou bénévole par la Grande-Bretagne, courante à l’époque, et enseigna plutôt que la Conquête fut un désastre pour les Canadiens français. À la différence de la future École de Montréal, il croyait cependant ce malheur réversible, et croyait particulièrement que diverses étapes de l'histoire du Québec depuis lors pouvaient apparaître comme des étapes de reconquête de la liberté, quoique encore bien incomplète.

Un écrivain aux talents multiples
Une impressionnante production écrite sur des questions d'intérêt national, politique, social ou religieux, tant sous forme d'articles que de brochures et d'ouvrages (dont deux recueils importants, Orientations, paru en 1935, et Directives, deux ans plus tard), résultera de cet engagement dans l'action. De 1920 à 1928, Groulx sera directeur de l'Action française, organe de la Ligue du même nom, puis, à partir de 1933, collaborateur régulier de L'Action nationale qui succède à la première après un intermède de quatre ans. En guise de "divertissement", selon ses propres termes, Groulx écrivit deux romans, L'Appel de la race (1922) et Au Cap Blomidon (1932), qu'il publia sous le pseudonyme d'Alonié de Lestres. Le premier de ces romans suscita une vive polémique mettant aux prises l'auteur avec, entre autres, le critique bien connu Camille Roy. Quelques années auparavant, en 1916, il avait fait paraître un premier ouvrage de fiction, un recueil de contes paysans, Les rapaillages.

Les écrits majeurs
Lionel Groulx épousa la théorie selon laquelle le seul espoir de survie pour le Québec était d’encourager un Québec français et catholique comme rempart contre la puissance anglo-protestante. Pour lui, la réforme et le redressement de la condition canadienne-française passaient donc par des mesures du gouvernement de Québec. Les écrits majeurs de Lionel Groulx sont notamment La Confédération canadienne (1917), Notre maître le passé (1936), Notre grande aventure. L'Empire français en Amérique du Nord (1534-1760) (1958), Histoire du Canada français depuis la découverte (1951) et Le Canada français missionnaire (1962). Il est connu pour avoir dit « Notre État français, nous l'aurons .
Il fut l'un des pères du mouvement indépendantiste québécois qui accéda au pouvoir avec René Lévesque en 1976. Groulx fonda l’Institut d’histoire d’Amérique française (IHAF) en 1946, un institut situé à Montréal dévoué à l’étude historique de la présence française en Amérique du Nord, à l'histoire du Québec, et qui rassemble la majeure partie des historiens québécois. Il fonda la Revue d'histoire de l'Amérique française (RHAF) l'année suivante.
Ayant pris sa retraite en 1949, il poursuivit son œuvre d'écrivain et continua à le combat pour le Canada français et reçut de nombreux honneurs. A la fin de sa vie, voyant les signes de dégradation de la société canadienne, il publia un dernier ouvrage Chemins vers l'Avenir dans lequel il expose ses vues sur le monde contemporain et les remèdes à apporter. Il mourut le 23 mai 1967 à Vaudreuil et eut des obsèques d'Etat accompagnées d'un jour de deuil national.

Albert FOEHR

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