lundi 15 octobre 2012

La corruption au Québec: Quel est le rôle des bureaucrates syndicaux?

LA CORRUPTION AU QUÉBEC : QUEL EST LE RÔLE DES BUREAUCRATES SYNDICAUX?


Un sujet retient l’actualité au Québec ces dernières années et fait couler beaucoup d’encre, celui de la corruption qui semble être devenu vraiment endémique au point  de paralyser la vie politique de la Belle Province. Les histoires d’enveloppes brunes bourrées de fric et largement distribuées à des candidats lors d’élections, dans le but d’acheter leur appui pour l’obtention de lucratifs contrats, ont fait la une des manchettes à maintes reprises depuis au moins deux ans. Tout porte à croire, selon les médias bourgeois, que le monde politique québécois est gangrené par la corruption et le gouvernement libéral de Jean Charest, qui est constamment frappé par des histoires de scandales, est maintenant considéré comme un des plus corrompu de l’histoire du Québec. Les domaines du transport et de la construction sont largement touchés par le phénomène de la corruption à cause des entreprises privées avides de profits par l’obtention de contrats payants. Ces entreprises cherchent par tous les moyens possibles à contourner les règlements pour mettre la main sur des contrats au détriment de leurs concurrentes et pour leur permettre de dépasser les coûts, phénomène courant pour les grands projets de construction, sans encourir de problèmes. Les politiques de privatisation des différents gouvernements québécois depuis de nombreuses années, notamment dans les travaux d’infrastructures, ont favorisé le renforcement de l’emprise des intérêts privés dans l’attribution des contrats pour la construction. Dans un système capitaliste, le pouvoir public et le pouvoir privé sont intimement liés pour la défense des intérêts du capital et la corruption est une partie intégrante des moeurs de la bourgeoisie qui veut augmenter ses taux de profits à n’importe quel prix. Il est donc tout à fait illusoire et erroné de compter sur un gouvernement contrôlé par l’oligarchie pour combattre la corruption dans laquelle il est impliqué jusqu’au cou. Il est important aussi de mentionner que le Québec est loin d’avoir l’exclusivité en matière de corruption, contrairement à ce que certains médias anglophones et antiquébécois du Canada ont tenté d’affirmer suite à l’éclatement des scandales de corruption.


La corruption au Québec implique donc la classe politique et le patronat, mais aussi un autre acteur représenté par la bureaucratie syndicale, qui démontre une fois de plus son rôle de pilier du système capitaliste libéral. La FTQ-Construction, qui a toujours cherché a exercer un monopole sur la représentation syndicale des travailleurs de la construction,  joue un rôle central dans le système de la corruption qui prévaut dans ce secteur d’activité. Les syndicats exercent un contrôle sur le placement des employés dans le domaine de la construction, ce qui a l’avantage de conférer une certaine sécurité d’emploi à des travailleurs vivant dans la précarité et l’incertitude, étant donné qu’ils ne peuvent travailler à l’année longue, notamment pour des raisons climatiques. Par contre ce mécanisme a parfois l’effet pervers de donner à des bureaucrates syndicaux le droit de décider qui peut ou non travailler sur les chantiers de construction, menant tout droit à un système de clientélisme digne de l’époque féodale. Par exemple, les travailleurs embauchés grâce à la FTQ-Construction lui doivent une certaine fidélité dans la lutte qui l’oppose aux autres syndicats comme la CSN-Construction et la CSD-Construction pour conserver le monopole de la représentation syndicale, à l’image des vassaux face à leur seigneur. Ceci dit, nous n’appuyons nullement la volonté du gouvernement libéral de Jean Charest d’éliminer le placement syndical dans le domaine de la construction, qui représente malgré tout un acquis pour la classe ouvrière face à l’arbitraire patronal.

La lutte intersyndicale a souvent connu des épisodes violents avec les fiers-à-bras de la FTQ-Construction qui expulsaient des chantiers par la force les travailleurs appartenant aux syndicats concurrents. En 1975, la Commission Cliche qui enquêtait à l’époque sur les violations de la liberté syndicale sur les chantiers de construction, a identifié le directeur de la FTQ-Construction, André Desjardins, comme étant lié au crime organisé et responsable d’une longue série d’actes de violence et d’intimidation contre les autres syndicats. Suite à ces accusations il a démissionné de ses fonctions pour mieux se consacrer à ses activités criminelles (1)! On peut donc voir que l’histoire de la FTQ-Construction n’est pas très glorieuse pour une organisation qui prétend défendre les droits des travailleurs! Encore aujourd’hui des dirigeants de ce syndicat entretiennent des relations étroites avec l’homme d’affaires corrompu Tony Accurso, qui est reconnu pour ses liens avec le crime organisé (2). Il est donc aisé de constater que la bureaucratie qui contrôle les syndicats n’a aucun problème à frayer avec des capitalistes en dépit de tous les beaux discours sur «la solidarité ouvrière»! Les actes de violence et d’intimidation à l’encontre de travailleurs supposés être des camarades dans le combat pour de meilleures conditions de vie et de travail ne semblent pas représenter un problème pour les bonzes de la FTQ-Construction. L’ancien président de la FTQ, Henri Massé, était reconnu pour son amour des voyages de pêche luxueux avec des patrons dont les employés sont syndiqués à la FTQ(3)! Des voyages qui coûtent entre 5000 et 8000$ pour cinq jours! Ce n’est certainement pas à la portée des travailleurs ordinaires qui doivent bien souvent se serrer la ceinture pour avoir une vie décente!

Ces exemples de copinage entre chefs syndicaux et grands patrons pourraient être multipliés à l’infini mettant ainsi à nu la collaboration étroite existant entre eux au delà de la rhétorique sur la lutte des classes. Les intérêts de la bureaucratie qui trône à la tête des syndicats ne sont manifestement pas les mêmes que ceux des travailleurs et des travailleuses qui doivent défendre avec acharnement leurs conditions de vie et de travail en ces temps de crise économique. La collusion avec le milieu du crime organisé de la part de certains responsables de la FTQ-Construction est une autre preuve que la corruption est malheureusement présente au sein des appareils syndicaux au même titre que dans la classe dirigeante capitaliste. Les bureaucrates syndicaux en tant que rouage du système économique capitaliste et mondialiste sont un obstacle majeur à l’avènement d’un système socialiste patriotique et corporatiste fondé sur une saine collaboration des classes et sur un respect mutuel des droits et devoirs des patrons et des ouvriers. La participation des travailleurs à la gestion des entreprises et au partage des profits est une excellente manière de maintenir l’ordre social en mettant fin à la stérile et nuisible lutte des classes qui ne permet en rien d’améliorer le sort de la classe ouvrière.

Richard Chartrand




Petit lexique pour les lecteurs non-québécois :

FTQ= Fédération des travailleurs et des travailleuses du Québec
CSN= Confédération des syndicats nationaux
CSD= Confédération des syndicats démocratiques

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